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Avis n° 23

Sur le refus de donner accès aux documents qui révèlent les motifs justifiant les principaux dégrèvements octroyés en matière de centimes additionnels communaux

Transposition

   Commission d’accès aux et de
    réutilisation des documents
            administratifs

   Section publicité de l’administration




                  13 avril 2015




               AVIS n° 2015-23

Sur le refus de donner accès aux documents qui
  révèlent les motifs justifiant les principaux
dégrèvements octroyés en matière de centimes
            additionnels communaux


                 (CADA/2015/19)
                                                                            2

   1. Un récapitulatif

Par e-mail en date du 2 mars 2015, le receveur de la commune d’Engis
demande ce qui suit au SPF Finances, en application de la loi du 11 avril
1994 : “les motifs de droit et de fait justifiant les principaux dégrèvements
octroyés pour l’année 2014 en matière de centimes additionnels
communaux. La demande soulignait qu’il était particulièrement
important pour la Commune d’être éclairée sur l’application éventuelle
de la disposition exonératoire de l’article 471, § 3 du CIR afin de
déterminer si ces dégrèvements pouvaient faire ou non l’objet de mesures
compensatoires de la part du Service Public de Wallonie dans le cadre du
décret programme du 23 février 2006 relatif aux “actions prioritaires pour
l’avenir wallon”. Le même courriel sollicitait également des
renseignements en ce qui concerne les éventuelles voies de recours
ouvertes à la Commune confrontée à la réduction significative de sa
principale ressource fiscale.

Par courrier en date du 6 mars 2015, la Direction des Contributions
Directes Précompte Immobilier de Liège du SPF Finances répond qu’elle
ne peut donner suite à ces demandes. Elle avance en outre les arguments
suivants. En premier lieu, elle se réfère à l’article 337 du CIR 1992 qui
instaure le secret fiscal et à l’interprétation qui lui est donnée dans cet
article et que l’on trouve dans le commentaire administratif :

     “Les administrations des provinces, de l’agglomération bruxelloise
     et des communes ne sont pas citées à l’art. 337, CIR 92, ce qui
     implique que les fonctionnaires de l’Administration des
     contributions directes ne peuvent, en restant dans leurs fonctions,
     leur fournir des renseignements fiscaux destinés à permettre
     l’application de réglementations provinciales, d’agglomération ou
     communales.

     Lorsque ces administrations participent à l’application d’une
     législation ou réglementation nationale, ou de décrets, ordonnances
     ou arrêtés des institutions communautaires et régionales, (p. ex.: les
     provinces, en matière d’allocations d’études ou les communes, en
     matière de service militaire-sursis ou dispense pour cause morale),
     les fonctionnaires de l’Administration des contributions directes
     peuvent néanmoins leur communiquer les renseignement
     nécessaires à l’application de ces législations, réglementations,
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     décrets, ordonnances ou arrêtés, mais il va de soi que ces
     renseignements ne peuvent en aucun cas être utilisés à d’autres fins
     que celles pour lesquelles ils ont été fournis (voir 337/10)”.

Selon la décision, les renseignements demandés n’entrent pas dans le
cadre de l’application d’une réglementation nationale ou régionale.

De plus, le SPF Finances avance que le service ne dispose pas d’une liste
par commune des personnes et entreprises “qui ont bénéficié, en matière
de précompte immobilier, de dégrèvements importants”.

Enfin, le SPF Finances se réfère à l’article 375, §1er du CIR ’92 sur la base
duquel, seul le contribuable qui a introduit une réclamation “en matière
de précompte immobilier” dispose du droit de contester la décision du
directeur régional par la voie judiciaire. Le SPF Finances se réfère en
outre à l’article 257, 4° CIR 92 comme cet article est d’application en
Région wallonne.

Par courrier en date du 24 mars 2015, Madame Nathalie Fortemps et
Monsieur Jean Bourtembourg introduisent au nom de la commune
d’Engis, une demande de reconsidération auprès du SPF Finances. Le
même jour, ils introduisent également par e-mail et par courrier une
demande d’avis à la Commission d’accès aux et de réutilisation des
documents administratifs, section publicité de l’administration, ci-après
dénommée la Commission.

   2. La recevabilité de la demande d’avis

La Commission estime que la demande d’avis est recevable. La
Commission constate que les demandeurs ont introduit simultanément la
demande reconsidération auprès du SPF Finances et la demande d’avis
auprès de la Commission tel que défini par l’article 8, § 2 de la loi du 11
avril 1994 relative à la publicité de l’administration.

   3. Le bien-fondé de la demande d’avis

L’article 32 de la Constitution et la loi du 11 avril 1994 partent du
principe de la publicité de tous les documents administratifs. La publicité
ne peut être refusée que si l’intérêt requis pour avoir accès aux
documents à caractère personnel fait défaut ou si un ou plusieurs motifs
                                                                            4

d’exception peuvent ou doivent être invoqués et que cela est motivé de
manière concrète et pertinente.

La Commission souhaite attirer l’attention sur le fait que l’article 32 de la
Constitution et la loi du 11 avril 1994 ne portent que sur l’accès aux
documents administratifs et non sur l’obtention d’informations. Comme
le constate la Commission, le demandeur demande “les motifs de droit et
de fait justifiant les principaux dégrèvements octroyés pour l’année 2014
en matière de centimes additionnels communaux”. La Commission
constate que le demandeur n’a pas demandé l’accès aux documents dans
lesquels figurent les motifs individuels de dégrèvement. Dans la mesure
où la motivation globale n’est pas disponible dans un document
administratif concret, l’article 32 de la Constitution et la loi du 11 avril
1994 ne sont pas d’application. Dans la mesure où la motivation
demandée n’existe pas, le SPF Finances peut dès lors à juste titre rejeter la
demande de la commune d’Engis. Elle doit alors invoquer ce fondement.

En soi, rien n’empêche une commune de demander l’accès à des
documents administratifs. L’arrêt n° 225.162 du Conseil d’Etat du 31
octobre 2013 stipule à juste titre ce qui suit:

     Considérant, (…) que le droit reconnu par l’article 32 de la
     Constitution appartient à «chacun»; que ni le constituant ni le
     législateur n’en ont excepté expressément les personnes de droit
     public, et que les documents administratifs sont en règle générale
     rendus accessibles à tous, tant aux personnes morales avec ou sans
     but lucratif qu’aux personnes physiques; que, prima facie, rien ne
     justifie que seules les personnes de droit public ne puissent en
     bénéficier; que ces dernières ne peuvent toutefois user du droit
     d’accès aux documents administratifs que dans la mesure
     compatible avec l’organisation des institutions, et notamment en
     relation avec leurs compétences; qu’en l’espèce, la commune
     requérante agit en relation avec sa compétence pour lever des
     centimes additionnels à la taxe concernée, et en qualité de
     créancier d’une partie des sommes dues à ce titre; qu’aux termes de
     l’article 470bis précité du CIR 1992, les dégrèvements sont liquidés
     «pour le compte» et «à la charge» de la commune; que la requérante
     pouvait invoquer les dispositions de la loi du 11 avril 1994 pour
     solliciter, dans les limites prévues par cette loi, l’accès aux
     documents concernés;
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     Considérant que la publicité passive des documents administratifs,
     organisée par la loi du 11 avril 1994, s’applique aux documents des
     autorités administratives fédérales visées à l’article 14 des lois
     coordonnées sur le Conseil d’État; que la partie adverse est une telle
     autorité, même si les recours contre certaines décisions que ses
     organes adoptent en son nom relèvent de la compétence des
     juridictions judiciaires; que la loi du 11 avril 1994 ne limite du reste
     pas son champ d’application aux décisions adoptées en qualité
     d’autorité administrative, mais vise tous les documents
     administratifs, définis par l’article 1er, alinéa 2, 2°, comme «toute
     information, sous quelque forme que ce soit, dont une autorité
     administrative dispose»;

     Considérant que l’organisation du procédé par lequel
     l’administration fédérale est chargée de la perception et du
     recouvrement des centimes additionnels pour compte des
     communes n’implique pas que ces dernières ne puissent réclamer
     aucune information ou obtenir aucune explication quant à la
     manière dont cette mission légale, certes étrangère à un mandat de
     droit civil, est remplie; que la demande ne peut être considérée
     comme manifestement abusive;

La Commission souhaite attirer l’attention sur le fait que dans la mesure
où les informations demandées figurent dans un document administratif,
la commune d’Engis a, il est vrai, le droit de demander l’accès à ce
document administratif mais cela ne signifie pas pour autant qu’il n’existe
aucun motif d’exception l’empêchant d’obtenir cet accès.

Dans ce cadre, le SPF Finances invoque l’article 337 du CIR 92 pour
refuser la publicité. Dans ce contexte, on peut à nouveau se référer à
l’arrêt n° 225.162 du Conseil d’Etat dans lequel il dispose

     “que le motif invoqué (…) soit le secret imposé par l’article 337 du
     CIR 1992, énonce l’obligation de secret professionnel incombant
     aux agents du SPF Finances lorsqu’ils agissent hors l’exercice de
     leurs fonctions; que l’autorité compétente n’a pas examiné si
     indépendamment des obligations de chacun de ses agents, la loi
     imposait un tel secret à l’administration elle-même à l’égard de
     toute personne, fût-elle directement intéressée à la dette d’impôt,
                                                                            6

      comme l’est, en l’espèce, la commune créancière de centimes
      additionnels à l’impôt en cause.”
Dans des avis antérieurs, la Commission a explicitement stipulé que le
secret fiscal doit être considéré comme un secret professionnel légal qui
vise à protéger le contribuable et s’applique à l’égard des agents
individuels des impôts. Par ailleurs, le secret fiscal ne peut être invoqué
que par un agent du fisc “hors l’exercice de ses fonctions”. Ce qui n’est en
l’occurrence pas le cas.

La Commission souhaite en outre attirer l’attention sur le fait qu’en soi,
le secret fiscal ne peut pas être invoqué pour refuser la publicité mais
qu’il doit être combiné à l’article 6, § 2, 2° de la loi du 11 avril 1994. Le
SPF Finances doit dès lors pouvoir démontrer que dans ce cas spécifique,
la publicité porte atteinte à l’objectif visé par le secret fiscal. Une telle
motivation fait défaut dans la décision.

En tout cas, le SPF Finances n’invoque aucun autre motif d’exception.
Dans l’arrêt 225.162, le Conseil d’Etat attire l’attention sur le fait que le
SPF Finances aurait dû examiner si la protection de la vie privée n’aurait
pas dû ou ne pourrait pas être invoquée pour refuser la publicité
d’informations y relatives. Il appartient au SPF de faire cet exercice et
dans la mesure où il estime devoir refuser la publicité, de motiver
concrètement le motif d’exception invoqué.

Bruxelles, le 13 avril 2015.




   F. SCHRAM                                                 M. BAGUET
   secrétaire                                                présidente

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