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Avis n° 107

Sur le refus de donner accès à l'intégrité du dossier fiscal

Transposition

     Commission d’accès aux et de
      réutilisation des documents
              administratifs

     Section publicité de l’administration




                     28 mars 2011




                 AVIS n° 2011-107

Sur le refus de donner accès à l’intégrité du dossier
                       fiscal

                   (CADA/2011/104)
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   1. Un récapitulatif

Le 18 janvier 2011, Monsieur Gerard van den Berg, demande au nom de
Monsieur X, à l'Inspection spéciale des Impôts (ISI) de Bruxelles, par
courrier recommandé, à obtenir l'accès au dossier administratif et
notamment aux documents qui ont donné lieu à la notification du 7
janvier 2011 et à la demande de renseignements du 10 janvier 2011 sur la
base de l'article 333, troisième alinéa, du Code des Impôts sur les revenus
1992 (ci-après CIR 92).

Les demandeurs répètent leur demande d’accès le 29 janvier 2011 et le 7
février 2011.

Par lettre recommandée en date du 11 février 2011, l'ISI de Bruxelles
refuse partiellement l'accès au dossier administratif, plus précisément aux
renseignements obtenus auprès de l'administration fiscale française qui
ont donné lieu à la notification et à la demande de renseignements. Le
refus a lieu sur la base de l'article 6, § 2, 2° de la loi du 11 avril 1994
relative à la publicité de l'administration combiné à des articles
28quinquies et 57 du Code d'Instruction criminelle. L'article
28quinquies, § 1er du Code d'Instruction criminelle stipule que
l'information, hormis les exceptions légales, est secrète et que toute
personne qui est appelée à prêter son concours professionnel à
l'information est tenue au secret. Celui qui viole ce secret est puni des
peines prévues à l'article 458 du Code pénal. Dans le courrier, il est
mentionné que les parquets de Bruxelles et d'Anvers ont ouvert une
information sur la base des renseignements obtenus auprès de
l'administration fiscale française, de sorte que ces renseignements font
partie d'une information ouverte auprès des deux parquets. L'article 57
du Code d'instruction criminelle porte sur le secret de l'instruction.

Par courrier recommandé en date du 28 février 2011, Madame Nathalie
Hollasky et Monsieur Gerard van den Berg, introduisent, au nom de
Monsieur X, une demande de reconsidération. Par courrier recommandé
à la même date, ils demandent à la Commission d'accès aux et de
réutilisation des documents administratifs, section publicité de
l'administration, ci-après dénommée la Commission, de formuler un avis.
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   2. La recevabilité de la demande d'avis

La Commission estime que la demande d'avis est recevable. Le
demandeur a en effet satisfait à la condition de simultanéité de la
demande de reconsidération et de la demande d'avis, imposée par l'article
8, §2 de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l'administration.

Dans la mesure où il s'agit de documents à caractère personnel, les
demandeurs n'ont l'intérêt requis que pour les documents qui concernent
leur cliente. Pour les documents qui ne peuvent pas être qualifiés de
documents à caractère personnel, le demandeur ne doit justifier d'aucun
intérêt. Un document à caractère personnel est selon l'article 1er,
deuxième alinéa, 3°, de la loi du 11 avril 1994 "document administratif
comportant une appréciation ou un jugement de valeur relatif à une
personne physique nommément désignée ou aisément identifiable, ou la
description d'un comportement dont la divulgation peut manifestement
causer un préjudice à cette personne.” Il n'est donc pas suffisant qu'un
document administratif porte sur une personne physique pour pouvoir
être considéré comme un document à caractère personnel.

Etant donné que le demandeur a obtenu partiellement accès aux
documents, l'avis de la Commission se limite aux documents
administratifs auxquels l'accès à été refusé.

   3. Le bien-fondé de la demande d'avis

L'article 32 de la Constitutions et la loi du 11 avril 1994 partent du
principe de la publicité de tous les documents administratifs. L'accès ne
peut être refusé que si une ou plusieurs exceptions peuvent être
invoquées.

La Commission constate que l'ISI de Bruxelles invoque l'article 6, § 2, 2°
de la loi du 11 avril 1994 combiné à l'article 28quinquies, §1er, du Code
d'Instruction criminelle. L'article 28quinquies du Code d'Instruction
criminelle a été inséré par l'article 5 de la loi du 12 mars 1998 relative à
l'amélioration de la procédure pénale au stade de l'information et de
l'instruction. Il ressort de la préparation parlementaire de cette loi (Doc.
Parl. La Chambre, 1996 – 1997, document n° 857/1, 7 et 26) que cet
article introduit explicitement le secret de l'instruction et que cela
s'applique tant à l'égard de l'auteur des faits et de la victime qu'à l'égard
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de tiers et du public. Il a été jugé nécessaire, pour le bon déroulement de
l'enquête préliminaire, d'empêcher que la divulgation d'informations
résulte en la perte d'éléments de preuve importants et, pour la protection
des droits du suspect, d'empêcher que la divulgation d'informations ne
puisse conduire à un jugement public entraînant une violation du droit à
la présomption d'innocence et au droit au respect de la vie privée.
L'information est "l’ensemble des actes destinés à rechercher des
infractions, leurs auteurs et les preuves, et à rassembler les éléments
utiles à l’exercice de l’action publique" et se déroule sous la direction et
l'autorité du ministère public. Il ressort de la préparation parlementaire
que le secret de la phase préparatoire du procès n'est pas absolu et doit
être adouci à l'égard de la presse afin de garantir le droit à la liberté
d'expression prévu à l'article 10 de la CEDH.

A l'égard du suspect, le principe du caractère secret de la phase
préparatoire au procès a pour conséquence qu'il n'est en principe pas
impliqué dans les investigations, hormis dans les investigations qui le
concernent personnellement et que les résultats de ces investigations ne
lui sont pas communiqués. Au cours de cette phase, ni le suspect ni son
avocat n'ont le droit de regard dans le dossier pénal.

La Commission estime qu'il n'est pas opportun d'invoquer l'article 6, § 2,
2° de la loi du 11 avril 1994 combiné à l'article 28quinquies, §1er, du
Code d'Instruction criminelle pour refuser la consultation. L'article
28quinquies, § 1er du Code d'Instruction criminelle stipule que
l'information est en principe secrète et que toute personne qui est
appelée à prêter son concours professionnel à l'information est tenue au
secret de l'enquête. Cette disposition ne s'applique toutefois pas aux
fonctionnaires de l'Inspection spéciale des Impôts, étant donné que sur la
base de l'article 463, premier alinéa du CIR 92 ceux-ci ne peuvent être
entendus que comme témoins. Il est dès lors interdit aux fonctionnaires
de l'administration fiscale de collaborer activement à l’information ou à
l’instruction. Ils ne peuvent pas intervenir à titre d’expert ni participer à
des perquisitions, des descentes sur les lieux ou des auditions. (Cour de
Cassation, 17 décembre 2008, AR P.2008.0878.F, à consulter sur
www.cass.be). Le fait que l'information à laquelle il est demandé accès
fasse également l'objet d'une information n'empêche pas qu'il s'agisse
toujours d'un document administratif au sens de la loi du 11 avril 1994. A
l'article 1er, deuxième alinéa, 2°, de la loi un "document administratif" est
en effet décrit comme "toute information, sous quelque forme que ce soit,
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dont une autorité administrative dispose". L'information et l'instruction
sont en effet indépendantes de l'enquête fiscale.

La Commission n'exclut toutefois pas que d'autres motifs d'exception
empêchent totalement ou en partie la divulgation des informations.

Tout d'abord, elle souhaite attirer l'attention sur l'article 6, §1er, 5° de la
loi du 11 avril 1994 sur la base duquel une autorité administrative
fédérale ou non-fédérale rejette la demande de consultation,
d'explication ou de communication sous forme de copie d'un document
administratif si elle a constaté que l'intérêt de la publicité ne l'emporte
pas sur la protection de la recherche ou de la poursuite de faits
punissables. Ce motif d'exception devrait être invoqué s'il devait
apparaître que la publicité peut entraver, voire même rendre impossible,
la recherche ou la poursuite de faits punissables. Si tel est le cas, l'ISI doit
le démontrer concrètement et cela doit faire l'objet d'une mise en
balance des intérêts entre d'une part, l'intérêt général servi par la
publicité et d'autre part, l'intérêt protégé.

Ensuite, la Commission souhaite attirer l'attention sur l'article 6, § 1er,
6° de la loi du 11 avril 1994 sur la base duquel une autorité administrative
fédérale ou non-fédérale rejette la demande de consultation,
d'explication ou de communication sous forme de copie d'un document
administratif si elle a constaté que l'intérêt de la publicité ne l'emporte
pas sur la protection d'un intérêt économique ou financier fédéral, la
monnaie ou le crédit public. Il ressort de la pratique d'avis de la
Commission et de la jurisprudence du Conseil d'Etat que l'intérêt fiscal
doit être considéré comme faisant partie de l'intérêt économique ou
financier fédéral. Dès lors, dans la mesure où la publicité porte préjudice
à cet intérêt et où l'intérêt de la publicité ne l'emporte pas, l'ISI peut,
moyennant une motivation concrète et pertinente, refuser la divulgation
de ces informations.
Il est également possible que le document demandé reprenne des
informations portant sur des tiers. Dans ce cas, l'accès à ces informations
doit être refusé sur la base de l'article 6, § 2, 1° et sur la base de l'article 6,
§ 2, 2°. Dans le premier cas, une autorité administrative fédérale ou non-
fédérale ne peut pas donner accès aux informations portant sur des tiers
si la publicité du document administratif porte préjudice au respect de la
vie privée de ces tiers. Dans le deuxième cas, la divulgation
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d'informations portant sur des tiers doit être refusée en raison d'une
obligation de réserve imposée par l'article 337 du CIR92. Toutefois, ces
motifs d'exception ne peuvent pas être invoqués à l'égard des
demandeurs dans la mesure où ces informations portent sur leur client.

La Commission souhaite insister sur le fait que, sur la base de l'article 6, §
4 de la loi du 11 avril 1994, toutes les informations contenues dans un
document administratif qui n'entrent pas dans la définition d'un motif
d'exception doivent être divulguées.

Enfin, la Commission souhaite attirer l'attention des demandeurs sur le
fait que l'application de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de
l'administration n'a pas d'influence sur les délais et effets qui sont fixés
dans le CIR 92 en ce qui concerne une demande de renseignements et sur
la base desquels le demandeur est tenu de répondre dans le mois qui suit
la date d'envoi (cf. art. 316 CIR 92).




Bruxelles, le 28 mars 2011.




   F. SCHRAM                                                  J. BAERT
   secrétaire                                                 président

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